Crèches
La Philharmonie déploie sa pédagogie de l’éveil musical dans les structures petite enfance, notamment dans les territoires défavorisés. Elle contribue ainsi au renforcement de l’éveil artistique et culturel des tout-petits, un enjeu majeur pour la santé, l’éducation, la culture et la lutte contre les inégalités sociales (Une stratégie nationale pour la Santé Culturelle de Sophie Marinopoulos).
Deux volets d’action sont organisés conjointement en crèche. D’une part, des ateliers d’éveil menés par les musiciens intervenants afin de répondre aux besoins fondamentaux de l’enfant, sur les plans relationnel, émotionnel, cognitif.
D’autre part, des formations destinées aux professionnels de la petite enfance pour les sensibiliser à l’importance de l’éveil musical dans le développement de l’enfant. En effet, ces derniers sont encouragés à prendre le rôle de médiateurs dans le domaine du sensible et à seconder au quotidien le ressenti et les émotions de l’enfant.
La Philharmonie participe à des dispositifs d’éveil artistique mis en place par les collectivités territoriales tels que « Hisse et oh ! Artistes et petite enfance » (Seine-Saint-Denis) et « Art pour grandir » (Ville de Paris) et à des expérimentations pédagogiques observées de façon scientifique tel que le projet « La Maison musicale de Clichy ».
Organisation d’une action en crèche
Les projets développés par le département Éducation de la Philharmonie adoptent une pédagogie fondée sur l’éveil sensoriel et les interactions interpersonnelles, entre enfants et adultes.
Les ateliers d’éveil musical
Les participants sont conviés à un voyage musical, sensoriel et émotionnel réalisé avec les sons de différentes matières et construit en plusieurs séquences de jeux spontanés, en dehors de toute consigne et parole imposée. Se dessinent différents paysages : pierre, papier, bois, métal et peau... Autant d’instruments, d’accessoires, de textures pour une aventure sonore, poétique et sensible partagée.
Résidence artistique en crèche - Le petit Phil
Grigny (91) - Juin 2024
Transcription
C’est un moment d’éveil musical et sensoriel avec des artistes musiciens, des professionnels de la petite enfance, des enfants et du jeu pour créer du lien. C’est ce qu’on essaie de faire, c’est de créer du lien de ce genre.
Oui, ça demande une énergie spécifique, je dirais. C’est pas l’énergie du sportif ni celle du joueur d’échec, mais c’est un truc entre les deux. Et chaque séance est différente parce qu’on n’a pas toujours les mêmes propositions de la part des enfants.
Je sens une évolution dans le sens où en fait plus ça va, plus on rentre dans la profondeur des échanges, donc par la musique et l’attention aux enfants, ce qu’ils proposent, l’observation et le jeu, l’humour des enfants, le partage de cet humour, les réponses, questions-réponses, tous ces échanges.
Oui. J’apprends toujours des choses parce qu’il y a toujours tellement à observer. À chaque fois on a affaire à, évidemment, enfin on travaille avec des enfants mais avec de l’humain, des êtres humains, on est tous là et on se rencontre à cet endroit-là, à ce moment-là. On ne sait pas où on va aller mais c’est comme la musique, tu démarres, tu sais que tu as une fin et puis le chemin entre les deux, ça va être de l’imprévu, l’improvisation et d’observer certains enfants, enfin d’observer les enfants, de jouer avec eux, il y a des attitudes, des interactions encore une fois, des altérités, des créations et des sensibilités différentes.
J’ai rêvé ou la petite, elle est métamorphosée aujourd’hui. Métamorphosée. Métamorphosée, par contre. C’est impressionnant, on a eu trois séances avec rien et aujourd’hui, tout d’un coup. Ah oui, puis elle a chanté. Elle chantait un peu quoi. Si je n’ai pas entendu. Elle a chanté Aboroma, elle a appris aussi à la petite quoi. Oui, oui, elle a chanté. C’est la qui nous a emmené dans les jeux beaucoup sur les pierres. Tout à fait.
On fait vraiment ce chemin ensemble et en général, on a deux heures d’atelier et deux heures de débrief au minimum. C’est pour ça qu’il nous faut du temps souvent pour redescendre un petit peu. Donc voilà, c’est comme un spectacle. De toute façon, les ateliers d’éveil, c’est toujours comme un spectacle. Chaque atelier, c’est une création artistique.
Claire, Agathe et moi, on n’a pas toujours envie de faire la même chose. On a un parc d’instruments qui est assez gros pour faire plusieurs séances très distinctes. Ça dépend de plein de choses et aujourd’hui, c’était franchement, c’était un peu magique aujourd’hui.
Il y a eu de la bienveillance des uns avec les autres, il y a eu le respect aussi je trouve du jeu des uns avec les autres et les enfants allaient, peu importe vers l’adulte, les enfants allaient tous vers eux-mêmes aussi, enfin, entre enfants, entre musiciens, et toutes ces interactions là ont vraiment rayonné. C’était une très belle matinée. C’est toujours une belle matinée parce qu’on apprend toujours plein de choses de toute façon.
Je me sens sur un petit nuage, là, un peu. Je déconnecte complètement de tout quand je fais ça en fait, je suis vraiment avec l’enfant, avec mes collègues, et on joue quoi, et quand on joue, on s’occupe de rien d’autre, donc voilà, il faut que je me remette dans un timing, je sais pas combien de temps on a joué, j’ai eu l’impression que ça a duré un quart d’heure, finalement ça fait 2 heures, et voilà, il faut que je me remette dans le temps.
Grand Cocon, à la Halte-Jeux de Grigny (2023)
Avec : Agathe Laforge Elieva, Claire Néollier, Frédéric Robouant
La formation des professionnelles
Des temps de rencontre-sensibilisation réunissant musiciens et professionnels, préparant ces derniers à mener une activité musicale en autonomie avec les enfants entre les ateliers. Il s’agit de temps dédiés aux professionnels de la crèche qui ont pour objectif de soutenir l’activité des ateliers, mais aussi d’accompagner le développement de compétences et d’interactions éducatives sensorielles, musicales, artistiques.
Il s’agit de rapprocher les professionnels et les musiciens dans un esprit de coopération. Les musiciens donnent aux professionnels les clés leur permettant de partager avec eux le plateau artistique que représente l’espace où auront lieu les ateliers. Différentes modalités d’échange sont recherchées : faire de la musique ensemble, partager des émotions, partager des approches pédagogiques, découvrir des instruments et des notions musicales... Des outils permettant aux professionnels de mettre en œuvre des temps de musique entre les ateliers seront également transmis par les musiciens.
Module de partage de documents/medias
-
Dossier : Résidences artistiques en crèche
-
Fiche métier : Intervenant en éveil musical
-
Vidéo : Présentation de l’éveil musical de la Philharmonie de Paris
Par Marie-Hélène Serra, dans le cadre de la Maison Musicale de Clichy-sous-Bois, 2020
Transcription
Ce projet est né après une période d’une vingtaine d’années où la Philharmonie de Paris et la Cité de la Musique, à l’époque, avait acquis une grande expérience et un grand savoir-faire dans les ateliers d’éveil musical.
Ça a commencé en 1998 environ, au tout début de la Cité de la Musique, mais c’était dans un mouvement général de la pédagogie pour l’enfant, de la pédagogie musicale pour l’enfant. Et ce qui était très intéressant pour la Cité de la Musique, c’est de pouvoir offrir aux enfants et surtout à leur famille, aux parents également, des activités dites d’éveil musical, où l’idée est d’éveiller l’enfant à la musique, mais avec tout ce que les créateurs et les compositeurs au XXème siècle ont pu eux-mêmes voir dans la musique.
Donc il s’agit d’une conception très large de la musique qui est très intéressante puisqu’elle rejoint les capacités qu’on voit chez l’enfant très tôt se développer.
C’est comme ça qu’on a construit les premiers ateliers d’éveil, avec cette idée d’une exploration des sons, cette idée d’un enfant qui est capable de faire des liens entre des sons et du symbolique. Ça peut être comment il rattache ça effectivement à son milieu familial, comment il rattache ça à des histoires qu’il a enregistrées, etc. Il y a un aspect symbolique, puis il y a un aspect aussi très tôt d’improvisation, de musicalité du son que l’enfant peut produire.
Voilà comment on a démarré cette histoire, dans un mouvement général en France et à l’étranger qui avait débuté dans les années 70 environ, et avec une originalité, celle de mettre l’enfant en contact avec pratiquement tous les modes de jeu qui existent dans l’humanité, que l’humanité a produites depuis ses origines.
Donc il y a une notion très large dans l’espace et dans le temps, puisqu’on a un parc instrumental pour l’éveil qui est considérable, avec des instruments du monde entier.
Cette situation toute assez originale à la Philharmonie de Paris, d’avoir la capacité de faire découvrir aux enfants un très grand nombre de jeux instrumentaux, les instruments de beaucoup de cultures du monde, les continents d’Asie, d’Amérique, d’Afrique, sont largement représentés dans les collections, ainsi que les instruments d’Europe. Donc ça, ça donne des activités d’éveil à la Philharmonie de Paris, qui ont un aspect culturel.
Très tôt dans sa vie, l’enfant découvre ce que l’humanité a créé au niveau des sons et de la musique.
Alors la deuxième idée qui se greffe sur les ateliers d’éveil musical, qu’on pourrait considérer comme une pédagogie de la musique adaptée à l’enfance, mais une pédagogie très moderne dans son regard, le deuxième élément qui s’est greffé pour nous, c’est d’être conscient que l’activité musicale et la musique participe au développement de l’enfant.
C’est un développement psychosocial, puisque ce sont les capacités émotionnelles, relationnelles, cognitives de l’enfant, qui grâce à la musique peuvent grandir. Et donc c’est intéressant d’en prendre conscience et de travailler l’éveil musical en le situant dans le développement global de l’enfant.
La troisième idée pour nous, quand il s’agit de faire des ateliers d’éveil musical dans des quartiers politiques de la ville ou dans des crèches qui sont situées dans ces quartiers, voire même de le proposer à la Philharmonie de Paris, c’est de permettre à des familles qui n’ont pas forcément la chance d’avoir des activités musicales pour leurs enfants, de permettre à ces familles de comprendre ce qui se passe au niveau de l’enfant. Quand l’enfant s’éveille musicalement, dans un environnement qui est fait pour ça, c’est-à-dire un environnement qui lui offre une sécurité affective, qui lui offre les moyens d’être confiant, les moyens de rentrer en relation avec les musiciens pour faire lui-même de la musique. Quand on offre tout ça à l’enfant, il se passe des choses dans le regard des parents et les parents s’émerveillent de ce que l’enfant est en capacité de faire. L’enfant aussi d’ailleurs est en plein émerveillement. Mais pour nous, ça c’est très important de le faire découvrir à bon nombre de parents et également d’ailleurs de professionnels de la petite enfance.
On se doit en tant qu’établissement public, en tant que professionnels de la petite enfance, de créer ces conditions, mais aussi de montrer aux parents que c’est très simple, au fond, de construire ces moments. Il suffit d’y consacrer un petit peu plus de temps et il suffit aussi d’avoir confiance en soi et en ses propres capacités de faire des jeux artistiques avec ses enfants. Tout le monde est capable de le faire. Donc ce message, on veut le passer aux familles, on veut aussi le passer auprès des professionnels de la petite enfance. Et ça a une dimension sociale. Pourquoi ? Parce que si on est en capacité, demain ou très vite, d’offrir ces moments à l’ensemble des familles, on sait qu’on donne des atouts supplémentaires aux enfants pour grandir et pour trouver des capacités de se développer, des capacités liées d’ailleurs aux apprentissages scolaires, des capacités de construire sa vie et des relations au monde qui sont positives.
Rencontre-sensibilisation avec les professionnelles de la ville de Grigny
Avec : Agathe Laforge Elieva et Renaud Ollivier